Interview de Tom Kettels - Blockchain et Gouvernance : L'Infrachain Summit en Avant-Plan

Kamel Amroune I 8:40 am, 18th September

L'Infrachain Summit se démarque des autres événements blockchain en mettant un fort accent sur la gouvernance et la conformité, des éléments essentiels pour le succès des projets blockchain. Tom Kettels, Project Lead chez Infrachain, nous explique comment le sommet favorise la promotion de cas d'utilisation concrets de la blockchain, soutient les entreprises locales et aborde l'importance croissante de la gouvernance décentralisée pour l'avenir de la technologie blockchain.


TS : Comment l'Infrachain Summit se distingue-t-il des autres événements blockchain, en particulier en mettant l'accent sur la gouvernance et la conformité ?

 

TK : Infrachain est un effort interprofessionnel visant à pousser la courbe d'adoption de la blockchain, notamment en partageant de l'expertise, en participant à des projets blockchain et en diffusant des informations sur les cas d'utilisation opérationnels de la blockchain. Dès sa création, Infrachain s’est penché sur les aspects gouvernance. En effet, une bonne gouvernance est essentielle à la réussite de tout projet blockchain.

 

Depuis sa première édition en 2018, l’Infrachain Summit s’intéresse donc également à tous les sujets liés à la gouvernance. C’est un souci horizontal, que l’on parle de cryptos, d’actifs numériques ou tout simplement de notarisation. Une des principales caractéristiques de la blockchain est que les participants qui y interagissent ne doivent pas se faire mutuellement confiance– la confiance vient de l’immuabilité et du code qui est ouvert et auditable. D’où l’importance d’une bonne gouvernance.

 

Par ailleurs, les projets blockchain doivent s’assurer d’être conformes aux lois, ce qui est d’autant plus vrai au Luxembourg où une majorité des cas d’application sont dans le secteur fortement réglementé de la finance. Il convient donc de garantir que le dispositif légal et réglementaire soit respecté.

 

Voilà deux aspects fondamentaux abordés lors du prochain Infrachion Summit et que l’on retrouve peut-être moins dans d’autres conférences dédiés à la blockchain. En effet, nous aurons une session dédiée aux aspects sécurité informatique et réglementaire, et une autre qui se penchera sur les DAO, les organisation autonomes décentralisées, ces nouvelles formes d’organisations rendus possibles par la blockchain. La gouvernance et la conformité seront également débattues dans la session dédiée à l’EBSI, la blockchain européenne, où il s’agit de garantir la conformité avec les règles européennes.

 

TS : Quel rôle joue l'Infrachain Summit dans la promotion des cas d'utilisation opérationnels de la blockchain par rapport aux hypes technologiques ?

 

TK : L’Infrachain Summit s’est toujours intéressé aux cas d’usage pratiques de la blockchain dans l’économie réelle. Notre but est d’inspirer, d’informer, voire d’éduquer notre audience. Bien que la technologie soit encore largement associée aux seules cryptomonnaies, elle a fait son chemin dans bien d’autres domaines. A travers les projets présentés, nous espérons donner des idées à ceux qui assistent à nos conférences et qui sont confrontés à des problématiques semblables dans leurs industries. Et puis, montrer surtout que la blockchain c’est bien plus que les cryptomonnaies.

 

TS : Quel est l'impact de l'Infrachain Summit sur les entreprises et les startups locales, et comment les aide-t-il à adopter la technologie blockchain ?

 

TK : Je reviens un peu à la question précédente. Les cas d’usage fournissent des pistes de réflexion aux acteurs locaux qui peuvent s’en inspirer. Nous demandons chaque année à nos orateurs de bien détailler à quelle problématique, la blockchain a pu proposer une solution et comment ils ont approché le déploiement de leur projet. Cela aide ceux qui veulent s’engager dans une situation semblable.

 

Nous veillons également à avoir des orateurs locaux et venus de l’étranger. Ce mélange permet de se confronter à de nouvelles idées et de découvrir de nouvelles manières de faire. Nous laissons une large place aux échanges directs, que ce soit lors des discussions en panel ou lors des moments de networking, pour qu’il y ait une véritable interaction entre présentateurs et audience.

 

Les acteurs étrangers apportent leurs visions propres qui sont peut-être différentes de celles prédominantes dans nos contrées. En participant à nos événements, ils découvrent aussi à leur tour un marché luxembourgeois qu’ils ne connaissaient pas ou peu.

 

Et puis, en permettant aux acteurs locaux de se présenter au Summit, nous leur proposant une plateforme intéressante pour faire connaître leurs services et leur savoir-faire à un public plus large.

 

TS : Comment voyez-vous l'évolution du débat sur la gouvernance décentralisée et son importance pour l'avenir de la blockchain ?

 

TK : La gouvernance décentralisée est au cœur du web 3 qui se caractérise notamment par l’interaction directe des participants (humains ou non) à un réseau sans passer par un intermédiaire. La blockchain assumera de plus en plus son rôle de ‘enabling technology’, c’est-à-dire de technologie de base sur laquelle d’autres technologies viendront construire des applications.

 

Prenez le cas d’une application IoT où les données provenant de différents capteurs alimentent une IA qui à son tour peut déclencher différentes actions via des scripts appelés smart contracts. Un exemple tout simple pourrait être une mesure du niveau de trafic associée à la gestion de feux tricolores. Les flux de données, c’est-à-dire qui a envoyée quand et quoi à qui d’autre, ainsi que les smart contracts sont enregistrés dans la blockchain. Dans ce scénario, il est par exemple essentiel de définir qui peut inscrire quoi sur la blockchain pour déclencher quelle action. C’est une question de gouvernance. Et de responsabilités.

 

Par ailleurs, de nombreux acteurs souhaitent désormais collaborer ensemble non plus sous forme de structure juridique classique comme une sàrl ou une SA, mais sous forme de DAO, d’organisation autonome décentralisée.

 

Les textes légaux et réglementaires n’étant pas toujours alignés aux possibilités que présentent la gestion décentralisée et les DAOs, le sujet restera d’actualité. Il y a 5 ans, lors de l’entrée en application du règlement général sur la protection des données, on craignait la fin de la blockchain en Europe. Or, il n’est rien et le monde blockchain a pu s’adapter aux contraintes qui découlent de ce règlement. Comme pour toute nouvelle technologie, des questions restent ouvertes et je suis confiant que des réponses seront trouvées. Cela prendra peut-être du temps, mais ça n’empêchera pas la blockchain de se continuer à se développer.


Propos recueillis par Kamel Amroune. 


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